Développé par les néerlandais de Sassybot, Fragments Of Him est décrit par ses auteurs comme une expérience narrative à la première personne. Il faut dire que depuis l'avènement des Walking Simulators ces dernières années, les concepts de jeu narratifs pleuvent avec plus ou moins de succès. Qu'en est-il de Fragments Of Him ?
Fragments of him est donc effectivement une expérience narrative. De ce point de vue, pas de tromperie. Ce n'est pas un jeu à proprement parler, puisqu'il n'y a pas de challenge, pas d'énigme, et d'une manière générale rien de ce à quoi les jeux conventionnels nous ont habitués. Il se rapproche du Walking Simulator, mais sans en être un non plus, car ici, on ne dirige pas de personnage, et il n'y a pas d'exploration. On incarne juste une sorte de spectateur invisible qui assiste à des tranches de vie de différentes personnes, sur lesquelles on n'a aucune prise. A vrai dire, s'il fallait lui trouver un genre, ce serait plus une espèce de roman-photo multimédia. En effet, tout au long du titre, les animations ne sont pas nombreuses. La grande majorité du temps, on se déplace dans des décors fixes en observant des protagonistes figés sur lesquels vient se plaquer le dialogue associé, comme pour un graphic novel dans lequel les classiques phylactères seraient récitées.
Will et les autres
L'histoire nous racontera les derniers instants de Will, un type lambda qui décède subitement alors qu'il est dans la fleur de l'âge, puis l'impact que sa mort aura sur les principales personnes qui ont traversé sa vie, à savoir sa grand-mère, son grand amour de fac Sarah, et Harry son compagnon actuel. A la lecture du synopsis, tout était prêt pour avoir un bon titre : l'histoire est intéressante et touchante, les différents sujets traités, tel que l'amour sous toutes ses formes, qu'il soit amical, amoureux ou familial, ainsi que la reconstruction de l'être après un décès, sont assez sérieux et profonds pour que l'on puisse plonger dans une expérience mature encourageant la réflexion. Mais hélas, tout cela tourne court. En effet, l'expérience ne durant qu'une heure et demie, aucun sujet n'est réellement approfondi. On aurait aimé que les développeurs creusent et aillent plus loin dans leurs idées que ce qu'ils ont livré. Will était un type extraordinaire soit, on ne demande qu'à le croire.
Quand Harry rencontre Sarah
Mais mis à part quelques anecdotes somme toute assez banales, on n'en saura pas beaucoup plus sur lui. Idem sur sa relation fusionnelle avec Sarah et Harry, tous les événements sont traités via de simples anecdotes dans des scènes de quelques minutes qui finalement sont proches de la vie ordinaire de tout un chacun. Du coup, on en vient à reprocher au titre sa durée de vie. Non pas pour une question de rapport temps de jeu/prix comme on a tendance à le faire trop souvent, mais parce qu'il aurait été bénéfique que l'histoire dure plus longtemps afin d'étoffer les relations entre les personnages ainsi que les différents sujets de société plutôt que cet enchaînement de courtes scénettes qui nous laissent sur notre faim. On regrettera aussi que l'expérience narrative ne tire pas parti du média jeu vidéo et de l'interactivité en général. En dehors de quelques choix de dialogues et de sélections d'objet du décors (qui de toutes façon n'ont qu'une légère influence sur le dialogue suivant et ne change pas la trame globale), il n'y a rien qui soit laissé au joueur tenant la manette. En gros, il aurait pu s'agir d'un court-métrage ou d'une nouvelle (voir comme je l'ai dit plus haut un roman-photo). Il n'y aurait pas eu de différence.
Dieu que c'est moche
Il faut aussi dire que techniquement, Fragments of Him est vraiment à la ramasse. Même si l'on donne peu d'importance à cet aspect dans un jeu, les nombreuses déficiences piquent les yeux. Visuellement, c'est très pauvre. Les personnages sont modélisés grossièrement et l'aliasing est monstrueux. On est proche de la qualité graphique d'un titre tout juste moyen de la génération de machines précédentes. Il ne s'agit clairement pas de l'élément que les développeurs voulaient mettre en avant, mais autant de carences rebuteront la plupart d'entre vous. A cela s'ajoutent aussi des longs loadings qui interviennent entre chaque scène. Sachant que celles-ci sont courtes (elles ne dépassent jamais la poignée de minutes), on se retrouve devant un titre dans lequel un quart du temps de jeu se passe devant l'écran de chargement.